mardi 14 août 2018

L'écriture inclusive

L'écriture inclusive

 

Introduction


Peut-être avez-vous déjà entendu parler de l'écriture inclusive. Ce mal n'est pas nouveau, mais il fait de plus en plus parler de lui.
D'autres avant moi en ont déjà découvert l'absurdité, dénoncé les travers, ridiculisé les erreurs et prévenu les dérives. Dans un premier temps j'ai donc pensé passer outre. Mais je sais d'expérience que ce genre de nouveautés néfastes ont la vie dure. Pour s'en débarrasser, il faut frapper juste et frapper fort. C'est ce qui m'a motivé à apporter ma contribution. J'essayerai d'apporter ma petite touche personnelle et vous renverrai à ma webographie pour tout ce qui a déjà été dit.

Qu'est-ce que l'écriture inclusive ?

L'écriture inclusive désigne l'ensemble des attentions graphiques et syntaxiques permettant d'assurer une égalité des représentations entre les femmes et les hommes.
( https://www.ecriture-inclusive.fr/)
Le langage épicène, la rédaction épicène, le langage neutre, l'écriture inclusive ou le langage dit « non sexiste » ou dégenré sont un ensemble de règles et de pratiques qui cherchent à éviter toute discrimination supposée par le langage ou l'écriture. Cela se fait à travers le choix des mots, la syntaxe, la grammaire ou la typographie.
Le terme épicène renvoie spécifiquement à la représentation des genres, incluant la féminisation des titres, la dénomination neutre et la dénomination des personnes transgenres. Quant à l'écriture inclusive, sa portée est plus large : outre le genre, elle vise aussi à éviter d'autres discriminations liées au handicap, à l'âge et à l'origine ethnique. 
 (https://fr.wikipedia.org/wiki/Langage_épicène)


Le but, louable en soi, semble différent dans les deux définitions; plus large dans la seconde. C'est l'un des points variables (il y en a d'autres, nous le verrons) qui fait qu'il n'y a pas une écriture inclusive mais une multitudes.

Analyse


Rentrons dans l'analyse. Afin de démontrer le bien-fondé de l'écriture inclusive, il faut se poser plusieurs questions : qu'est-ce ? est-ce utile ? est-ce mieux ?
Autrement dit : une fois que nous avons défini le sujet, il faut en démontrer l'utilité. Cela fait, il faut encore établir s'il est pertinent de l'utiliser. En effet l'un n'implique pas forcément l'autre. Un nouveau système peut avoir une utilité démontrée et n'être pourtant pas utilisé car sa mise en place serait trop compliquée - voir impossible, ou parce que le prix à payer est trop élevé ("le jeu n'en vaut pas la chandelle" dit-on), ou encore parce que le système actuel est plus performant.

J'ai trouvé et recopié fidèlement ci-dessus deux définitions. L'une provenant d'une source pro-écriture inclusive, l'autre provenant d'une source neutre. Elles nous apprennent que l'écriture inclusive a pour objet d'éviter de discriminer certains groupes de personnes. Il semble que les femmes soient le sujet principal puisqu'elles seules sont mentionnées dans la première définition. De plus, les règles de l'écriture inclusive visent majoritairement le genre des mots.

L'image de la femme


Concrètement, c'est bien l'image de la femme qui est défendue par l'écriture inclusive. Les autres minorités citées par Wikipédia (handicap, âge, origine ethnique) ne sont mentionnées quasi-nulle part ailleurs et ne valent pas la peine qu'on s'y attarde.

Si nous poursuivons la lecture de la page https://www.ecriture-inclusive.fr/, nous en apprenons davantage sur le but de l'écriture inclusive.


Loi sur la parité dans les conseils d'administration, création du Haut Conseil à l'Egalité, dispositions diverses sur l'égalité salariale : de nombreuses initiatives ont vu le jour pour permettre l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. 

Malgré les progrès réalisés, d'importantes inégalités subsistent. L'Observatoire des inégalités estime par exemple qu'en France, les hommes continuent de gagner en moyenne 23,5% de plus que les femmes, et que près de 11% de ces écarts de salaires relèvent de la "discrimination pure".

Un nombre croissant d’entreprises et d’institutions le comprennent : le langage constitue un levier puissant pour faire progresser les mentalités. En adoptant l’écriture inclusive, chacun·e peut faire avancer l’égalité entre les femmes et les hommes !
Rien que ça! Si je pouvais croire que l'écriture inclusive allait permettre de réduire l'écart salarial entre les hommes et les femmes, je considérerais plus sérieusement de l'adopter. Mais j'imagine mal les patrons se rendre compte tout d'un coup que "bon, c'est vrai qu'en lisant "les employé.e.s" on se rend tout de suite mieux compte qu'iels sont égaux. Allez hop! salaire égal pour tout le monde."
Un peu simpliste...

On veut rétablir une égalité homme-femme. Il s'agit donc d'améliorer l'image de la femme et son statut.

Parlons-en de l'image de la femme. Car la situation n'est pas brillante.

La femme est hyper-sexualisée, que ce soit dans
la publicité :


les films :


la mode :




la politique :


les arts (terme sujet à discussion) :



Tout ceci est bien ancré, accepté, légitimé. Il s'agit pourtant toujours d'une instrumentalisation pure et dure du corps de la femme. Il devient un objet, un présentoir, un outil qui fait vendre. Je pense qu'un costume un peu plus complet n'aurait pas empêché Wonder woman de combattre le crime. En revanche, il aurait certainement déçu un certain public.
Concernant l'instrumentalisation du corps de la femme, j'ai parlé jusqu'ici de la version soft.
La version moyen-soft, c'est la pornographie, la prostitution, les spectacles érotiques, etc. Les avis seront forcément différents sur la question. Dont-on interdire ? Ne le doit-pas ? Faut-il tolérer ? La réponse ne contribuera en rien à cet article. Mettons-nous cependant tous d'accord sur ceci : ces éléments véhiculent une image de la femme dégradante, et la femme est bel et bien considérée comme un objet propre à satisfaire le désir de l'homme.
Si j'insiste sur l'état de l'image de la femme dans la société, c'est parce qu'il a toute sa place dans le sujet qui nous occupe. Car le but avoué (et louable il faut le reconnaître) de l'écriture inclusive, c'est d'éviter toute discrimination. Pourquoi ? Afin de rétablir une égalité homme-femme. Comment parler d'égalité homme-femme lorsque les secondes sont considérées comme des objets par les premiers ?

J'ai donc placé l'image de la femme dans un contexte plutôt sombre, certes, mais malheureusement exact. Je me permet à présent de remettre à sa place, gentiment mais fermement, l'importance de l'écriture inclusive dans ce contexte. J'entends par là qu'il faut choisir ses batailles et que si l'on veut redorer l'image de la femme, l'écriture inclusive n'est peut-être pas la priorité.
Pour faire un parallélisme : il est tout à fait louable de distribuer des sucreries à Saint Nicolas pour les enfants. Mais si on prétend vouloir lutter pour le bien-être des enfants dans le monde, je pense que cela passe d'abord par la distribution de vaccins, eau potable, produits de première nécessité.
Mesdames, en vous proposant l'écriture inclusive, on vous balance des sucreries.

Malgré tout, une petite avancée vaut mieux que rien du tout. Si donc l'écriture inclusive devait avoir une efficacité démontrée - fût-elle faible - pour améliorer l'image de la femme, cela pourrait en valoir la peine. Tout nous pousse cependant à croire le contraire. En effet :
Des langages pourvus de dizaines de «genres» (ou «classes nominales») sont employés dans des pays où les femmes n’ont pas accès à l’espace public, où elles sont asservies à l’espèce, reléguées à un rôle reproductif, excisées, chassées, empêchées d’avorter, de travailler, où elles n’accouchent pas en sécurité (ça n’est rien de le dire : il est des contrées où elles sont une sur sept à mourir de complications liées à la grossesse.)
(https://www.contrepoints.org/2018/01/15/307405-suis-contre-lecriture-inclusive)

C'est donc l'expérience qui apporte la touche finale pour montrer que non, l'écriture inclusive n'a aucun moyen d'être utile à la cause qu'elle prétend servir.

L'écriture inclusive et son utilisation pratique


L'écriture inclusive n'est pas seulement inutile, elle est également nuisible.

Nouveaux termes

Lorsqu'on découvre l'écriture inclusive, on se prend à sourire à la vue de mots visant à neutraliser certaines expressions sexistes, tels que iels (ils/elles), ceules ou celleux (ceux/celles), toustes (tous/toutes). Après avoir bien rit, on devient quand même un peu inquiets car on se demande si on en viendra un jour à les utiliser. Ceules qui pensent que ça n'arrivera jamais sont peut-être un peu optimistes.
Je cherche toujours à savoir comment l'on devra souffrir ces termes à la lecture. Soit il faudra prononcer le mot tel quel, soit le remplacer par son équivalent (par exemple, lire "toutes et tous" si on rencontre "toustes"). Aucune des deux possibilités ne m'enthousiasme, c'est un euphémisme. J'y reviendrai plus longuement.

Le point médian

L'objet du point médian est d'éviter l'utilisation du masculin neutre qui ne serait finalement pas assez neutre. On dit en effet que le masculin l'emporte sur le féminin. Il n'en faut pas plus pour se l'imaginer conquérant en fier, tel un Napoléon ou un César avec à ses pieds la dépouille du féminin vaincu. L'injustice flagrante, l'oppresseur et l'opprimé... horrible!
Heureusement, les héros défenseur du féminin, armés de l'écriture inclusive ne sont pas restés indifférents à cette situation. Des redondances à n'en plus finir, des mots nouveaux et laids, des complications dont nul n'avait besoin, et voilà le problème réglé.
Et le point médian bien sûr. Nous n'écrirons donc plus "les employés" mais "les employé·e·s". Je soupçonne fortement que cette initiative soit l’œuvre de Microsoft, HP ou Logitech afin de faire racheter des nouveaux clavier à toute la francophonie. Sachez tout de même que pour faire apparaître ce caractère spécial à l'écran, il existe un raccourci clavier : Alt+0183. Pratique!
Le point médian a l'avantage de respecter les même règles que le point mathématique (le point de multiplication). En effet la distributivité s'applique à la lecture. "Les employé·e·s" se lira : "les employés et employées", parce que dire "les employé point E point S" serait encore pire.

Petite note en passant : lire un texte écrit avec des points médians reviens, en pratique, à féminiser toutes les expressions où il est utilisé.
Lorsque je lis : "A l'automne dernier, Raphaël Haddad et son agence de communication Mots-clés ont publié un très joli petit manuel d'écriture inclusive, en libre accès et destiné à tou•te•s. Car ce ne sont pas seulement les communicant•e•s, les journalistes, les enseignant•es et professeur•e•s qu'il s'agit d'initier à l'écriture égalitaire. Chacun•e de nous, usagèr•e de la langue, détient en tant que tel•le une responsabilité éthico-politique."
(http://feministesentousgenres.blogs.nouvelobs.com/tag/%C3%A9criture+inclusive)
mes yeux font l'impasse sur ces points inélégants et lisent simplement le mot complet, transformant  tou•te•s en toutes, communicant•e•s en communicantes et ainsi de suite.
A la compréhension de la lecture donc, les termes ne sont pas neutres mais purement féminisés.

Comment on fait ? Personne ne sait.

Pour renforcer la sensation de flou artistique, il faut encore comprendre qu'un partisan de l'écriture inclusive n'est pas l'autre. Certains seront pour la féminisation des noms de métiers, mais pas pour le point médian. D'autres seront pour les deux. Certains apprécierons les pittoresques ceules et toustes, d'autres non.
Enfin, ils ne seront pas tous d'accord non plus sur les circonstances de son utilisation.
Imaginez donc l'écriture d'un poème en utilisant l'écriture inclusive.
Certains vous dirons que dans ce cas l'écriture inclusive ne s'applique pas. Ceux-là manquent de constance et de logique. Sans compter qu'appliquer une règle telle que l'écriture inclusive dans certains cas et pas dans d'autres ne ferait qu'empirer une situation déjà trop compliquée.
D'autres vous dirons qu'il faut l'appliquer mais sans utiliser les points médians.
Imaginons donc que je veuille composer une ode à la boulangerie (et pourquoi pas ?). Je ne pourrai pas le commencer par "Les boulangers sont vraiment courageux". Je serai obligé d'écrire "Les boulangers et les boulangères sont vraiment courageux."
On note ici deux choses :
  • ma deuxième ligne comporte 16 pieds. C'est moche, c'est long, c'est redondant (j’admets que ce n'était pas très prometteur dès l'abord mais bon...). Un rallongement inévitable des phrases viendra troubler la créativité  et restreindre la liberté de l'auteur
  • la fin du vers est une entorse à l'écriture inclusive car j'accorde le mot "courageux" uniquement au masculin. En théorie donc, je ne serais pas encore sorti de l'auberge

Les derniers (les extrêmes) qui vous dirons que dans toutes circonstances il faut utiliser les points médians, rencontreront non seulement le problème cité précédemment, mais rendrons de surcroît leur texte illisible.
Je vous laisse admirer un dernier exemple : "Les docteurs habillés de blouses blanches" qui devient "Les docteur·esse·s habillé·e·s de blouses blanches". Le texte est sensiblement allongé, et j'ignore totalement comment le lire.

Comment lire ?

Imaginons maintenant devoir lire un texte à haute voix.
Si l'ensemble des techniques va sensiblement rallonger la longueur du texte - et probablement dévier l'attention de l'auditoire de l'essentiel -, ce serait à peu près la seule conséquence s'il n'y avait pas de nouveau le point médian.
Ce qui rend cette règle tout à fait originale, c'est que si elle était mise en place, elle serait la seule règle de toute la langue française qui nous obligerait à prononcer des mots qui ne sont écris nul part.
Par exemple si je dois lire : "Les auteur·rice·s écrivent des livres.", je devrai dire : "Les auteurs et les autrices écrivent des livres." Ce n'est pourtant pas ce qui est écrit.
Rappelons en passant que la langue française, pour belle qu'elle soit n'en est pas néanmoins facile à apprendre (je commet moi-même énormément d'erreurs et m'en excuse auprès de vous). Rajouter des règles aussi radicales ne me semble pas judicieux, surtout que leur utilité et leur légitimé sont très loin d'être démontrées.

Ambiguïté

Ce point part plus d'une appréciation personnelle mais je tenais à le partager. C'est une question de ressenti, donc non-objective.
Prenons un sujet souvent cité dans les articles consacré à l'écriture inclusive : la déclaration des droits de l'homme.
La dénomination est inadmissible pour tout bon défenseur de l'écriture inclusive qui se respecte.
Voyons les alternative

Déclaration des droits naturels
 ou déclaration des droits humains. Cette dénomination me déplaît fortement en ce sens que, comme son nom ne l'indique pas, ces droits ne concernent plus un sujet (l'homme) mais sont qualifiés d'humains. Or les droits ne sont pas humains. Ils concernent l'homme. L'idée n'est pas la même. L'appréciation n'est pas la même. Pour moi en tout cas. On dit "droits humains" comme on dirait "droits importants" ou "droits universels" ou encore "droits clairs et précis". "Humains" n'est qu'un qualificatif. "Homme" est un sujet (neutre et qui englobe tout le genre humain rappelons-le).
A vrai dire, "déclaration des droits des humains" pourrait me satisfaire. Le sujet auquel s'applique ces droits est clairement mentionné. Son importance est rétablie.

Déclaration des droits de l'homme et de la femme
Cette façon d'énoncer la chose est encore plus ambiguë. Outre le fait qu'elle veut insister inutilement sur le fait que les droits de l'homme, mais aussi de la femme sont concernés (je pense que personne n'avait pensé qu'elle excluait les femmes - et ceux qui pensent que la femme n'a aucun droit ne se soucient généralement pas de la déclaration des droits de l'homme de toute façon), outre cela donc, elle introduit un doute sérieux précisément sur ce qu'elle voudrait éclaircir : ces droits sont-ils les mêmes pour les hommes et pour les femmes. Cette forme d'expression n'a pas pour effet de donner les mêmes droits aux femmes qu'aux hommes, mais plutôt de leur en donner des différents car on peut l'interpréter avec beaucoup de logique comme "les droits de l'homme et les droits de la femme". De même qu'on écrirait "les organes reproducteurs de le l'homme et de la femme" où clairement, les deux organes sont différents chez l'un et chez l'autre.

D'autres exemples d'ambiguïté foisonnent sur le web. Je vous invite à consulter ma webographie.

C'est inutilisable tout simplement

Prenons une phrase simple en exemple : "Jules César a envoyé des romains envahir la Gaule."
Dans des circonstances normales, cette phrase est correcte et évident : une armée romaine a envahi la Gaule sur ordre de César. L'information est claire.
Avec l'écriture inclusive, les choses ne sont pas si simples. En effet, pour écrire ma phrase correctement, je dois d'abord savoir si l'armée romaine comptait des femmes.
Si elle n'en comptait pas, ma phrase est correcte. Si oui, je dois alors écrire en pointillé : "romain·e·s". Et ce faisant j'insiste spécifiquement sur le fait qu'il y avait des hommes et des femmes. Or, je n'en sait rien.
Je ne suis pas un spécialiste en la matière. Ma phrase fait peut-être partie d'un texte qui parle de tout autre chose, et le fait qu'il y ait des femmes ou non dans l'armée romaine n'a peut-être aucune importance. Mais pour des raisons purement grammaticales, je devrai néanmoins me renseigner sur le sujet si je veux l'avoir écrit correctement.
Il faudra donc toujours savoir de quoi on parle (ce qui est bien) jusque dans les moindres détails même s'ils ne sont pas pertinents (ce qui est lourd).

Un autre exemple (parmi d'autres) montre que l'écriture inclusive ne tient pas la route dans la pratique. Imaginons une espèce animale, par exemple le cheval. Faut-il dans ce cas utiliser l'écriture inclusive et en parler systématiquement comme étant "les chevaux et les juments" ?
Si oui, il va donc falloir apprendre les noms précis de ces dames jusqu'ici ignorées (paonne hase, chevrette, laie, cochette, daine,...). Les choses se corseront encore lorsqu'on parlera d'un groupe d'animal bien précis, comme par exemple dans la phrase : "Ce pré occupé par des chevaux". Il nous faudra observer les entre-pattes de ces quadrupèdes afin de déceler la présence de juments au risque d'en parler incorrectement.
Ou alors on décide que l'écriture inclusive ne s'applique pas. Dès lors la règle n'est plus logique mais purement idéologique. On aura introduit dans la langue française une règle qui sera féministe par nature, par but, et par utilisation; et qui ne suivra aucune logique. Il s'agira très clairement d'une manipulation politique de la langue française.
(le saviez-vous ? La femelle du lézard est un "lézard femelle" et non une lézarde... de quoi faire bondir les féministes amis des animaux)

Enfin, lorsque l'on met un défenseur de l'écriture inclusive face à des problèmes pratiques, il trouve généralement des façons de contourner le problème. "Vous n'avez qu'à faire comme ceci", "vous n'avez qu'à écrire cela", "voyez, écris de cette façons le problème est résolu". Oui mais! Ces "solutions", bien souvent rallongent inutilement le texte, l'embrouillent, le rendent moins agréable à lire, plus difficile à comprendre et sont bien souvent fort inélégantes.
De plus, la langue est d'abord un outil d'expression. Et j'ose le dire, la langue française est belle. Elle est belle parce que des artistes ont pu l'utiliser simplement et librement, sans dépendre de règles idéologiques inutiles.

Peut-être un peu trop idéologique

 

Le danger de l'écriture inclusive, c'est qu'au fond n'importe quel texte va devenir un texte revendicateur en faveur du féminisme. Chaque phrase insistera - avec ses ceules, ses toustes, ses redondances et ses points médians - sur l'égalité homme-femme. Je n'ai rien contre l'égalité homme-femme, mais je ne veux pas en faire un sujet sous-jacent de chaque texte que j'écris.

Le problème, comme pour beaucoup de sujets d'ailleurs, ce n'est pas l'objet de la discussion en lui-même mais bien la façon dont on le comprend. En effet, d'un point de vue officiel, le masculin ne l'emporte pas sur le féminin comme on a coutume de le dire. Le masculin est "le genre utilisé par défaut lorsqu’il n’y a pas de sexe ou de nom associé".
( https://fr.babbel.com/fr/magazine/entretien-avec-anne-abeille/)
 Ou pour le dire autrement :
(...)Homme, d'ailleurs, s'emploie tantôt en valeur neutre, quand il signifie l'espèce humaine, tantôt en valeur masculine, quand il désigne le mâle. Confondre les deux relève d'une incompétence qui condamne à l'embrouillamini sur la féminisation du vocabulaire. Un humain de sexe masculin peut fort bien être une recrue, une vedette, une canaille, une fripouille ou une andouille. De sexe féminin, il lui arrive d'être un mannequin, un tyran ou un génie. Le respect de la personne humaine est-il réservé aux femmes, et celui des droits de l'homme aux hommes ? Absurde ! Ces féminins et masculins sont purement grammaticaux, nullement sexuels.
(
(http://www.lepoint.fr/actualites-monde/2007-01-25/le-sexe-des-mots/924/0/92121)

"Purement grammaticaux, nullement sexuels". Les partisans de l'écriture inclusive trouvent donc des problèmes là où il n'y en a pas.

Rassurons-nous pourtant. Cette nouveauté tombera probablement aux oubliettes (là où est sa place) et ne devrait plus menacer la langue française bien longtemps. L'académie française s'est d'ailleurs prononcée sur le sujet de façon très claire : http://www.academie-francaise.fr/actualites/declaration-de-lacademie-francaise-sur-lecriture-dite-inclusive


Plus haut, j'ai parlé du problème de la déclaration des droits de l'homme. Et au fond, l'exemple peut être utilisé dans ce chapitre également car le problème idéologique est évident.
En voulant remplacer "la déclaration des droits de l'homme" par "la déclaration des droits humains", on a - pour les raisons évoquées plus haut - sacrifié le sens et la clarté à l'idéologie.
Or, si la langue est une arme très forte que l'on peut utiliser pour des raisons idéologique, ce n'est pas ce qu'elle est de nature. Sa nature est d'être un moyen d'expression.
On peut l'utiliser pour des raisons idéologiques, mais elle ne doit pas être faite pour ça. Pas que.

Personne n'est obligé de l'utiliser.

 

Ah vraiment ? Dans un premier temps, on ne sera probablement obligé que de le lire (puisque les partisans l'utilisent d'ors-et-déjà, se mettant de facto en porte-à-faux avec les règles d'orthographe conventionnelle, établies et officielles).
Mais sachant qu'aujourd'hui déjà (depuis 2017 en réalité), au moins un éditeur français a prit l'initiative d'imprimer un manuel scolaire en utilisant l'écriture inclusive, on est en droit de considérer qu'on cherche à l'imposer.
En passant, je rappelle que pour l'instant, toutes ces règles de l'écriture inclusive sont très loin d'être uniformisées et standardisées. Ses partisans l'utilisent chacun à sa sauce et à sa préférence ce qui donne un effet global très brouillon et assez chaotique. Est-ce vraiment un contexte approprié pour l'utiliser dans un manuel scolaire ?

Enfin, si dans quelques années l'écriture inclusive est adoptée, on peut se demander quelles seront les réactions envers ceux qui ne la pratiquent pas. Seront-ils qualifiés de "réacs", de misogynes ?


Donc tout est à jeter ?


Pas forcément. Une nouveauté de l'écriture inclusive laisse une place à la logique ainsi qu'à la faisabilité. Il s'agit de la féminisation des fonctions, titres, métiers.
En effet, rien n'empêcherait de parler d'une pompière, d'une autrice (je préfère personnellement "auteure" mais soit), d'une cheffe. C'est même plutôt logique en réalité.
Et ça fonctionne... pour autant que le sujet soit au singulier, ou qu'il soit constitué d'un groupe exclusivement féminin.
Dans le cas où l'on parle d'un groupe d'hommes et de femmes, il faudra soit continuer à utiliser le masculin neutre, soit se rabattre sur les redondances, les points médians et les phrases à rallonge avec tous les inconvénients pré-cités.
Un bon compromis donc passe par un enrichissement de notre vocabulaire au profit d'une féminisation des noms à forme exclusivement masculine, sans pour autant modifier la règle du masculin-neutre qui prévaut dès lors qu'on parle d'un groupe mixte.

En conclusion


L'écriture inclusive, dans sa présentation la plus extrême, est inutile et inutilisable. La conséquence de son utilisation alourdira inutilement les écrits et en compliquera l'écriture et la lecture.
Bref! en théorie elle est inutile. Dans la pratique elle est néfaste.
En revanche, une utilisation modérée, logique et réfléchie peut être envisagée et contribuer à la richesse de la langue française.
Dans son idéologie, l'écriture inclusive semble avoir tout faux. Je vois mal comment elle contribuera à améliorer le statut de la femme dans la société. L'expérience d'autres pays montre que le statut de la femme ne dépend pas d'une écriture genrée, inclusive ou épicène. Je pense que si l'on veut améliorer l'image de la femme dans la société, il y a d'autres combats plus importants à mener.


Webographie :

POUR
https://www.ecriture-inclusive.fr/
https://www.sudouest.fr/2017/10/12/qu-est-ce-que-l-ecriture-inclusive-et-pourquoi-pose-t-elle-probleme-3856018-4699.php
https://www.motscles.net/ecriture-inclusive/
http://feministesentousgenres.blogs.nouvelobs.com/tag/%C3%A9criture+inclusive


CONTRE
https://www.contrepoints.org/2018/01/15/307405-suis-contre-lecriture-inclusive
http://www.lepoint.fr/actualites-monde/2007-01-25/le-sexe-des-mots/924/0/92121
http://www.academie-francaise.fr/actualites/declaration-de-lacademie-francaise-sur-lecriture-dite-inclusive
https://www.causeur.fr/ecriture-inclusive-feminisme-ideologie-francais-149732
https://www.causeur.fr/ecriture-inclusive-orthographe-ecole-hatier-147170


NEUTRE
https://fr.babbel.com/fr/magazine/entretien-avec-anne-abeille/
https://fr.wikipedia.org/wiki/Langage_épicène
https://www.youtube.com/watch?v=Aq2XboD-q_U

https://www.huffingtonpost.fr/2017/09/25/hatier-publie-le-premier-manuel-scolaire-en-ecriture-inclusive_a_23222113/